lundi 18 juin 2012

Les choses sérieuses

Jeudi  29 mars 2012

Tiens, et si pour une fois nous parlions d'équitation.

Non pas que j'omette d'en causer au sein de mes récits, bien au contraire, mais je me dois de reconnaître que je mets plus facilement l'accent sur les anecdotes, les à-côtés et les petites histoires des reprises du jeudi soir, considérant qu'il peut être fastidieux pour le lecteur de se voir détailler le nombre de tours effectués au pas lors de la détente ou la liste complète des aides à mettre en place pour effectuer correctement une cession en dedans ou une épaule à la jambe
Bien que, raconté par une plume talentueuse cela puisse éventuellement être passionnant , je n'oserais me lancer dans de telles aventures littéraires.

Et pourtant, il y a parfois certaines reprises qui méritent d'être détaillées, tant elle donne l'impression d'effectuer un bond en avant par rapport à tout ce que l'on a pu effectuer auparavant.
En effet, quelques minutes avant le début de la séance, La Monitrice nous a invité à rentrer dans le manège pour l'aider à mettre en place le parcours d'obstacle. Elle avait jusque-là l'habitude de monter ses parcours toute seule comme une grande, le besoin de faire appel à notre main d’œuvre étant le premier indice qui nous a mis la puce à l'oreille.
Et une fois les obstacles installés à leurs places respectives, je me suis dis alors "Waouh, là, c'est du sérieux"...

Je vous fais le détail.
Départ le long du pare-botte à main gauche pour un saut de puce histoire de se mettre en jambe. On continue sur la piste au fond du manège, et dès le début de la seconde longueur, il s'agit de sauter de suite un vertical placé sur la piste mais en prenant la diagonale. Et donc à aborder de biais, de travers, de façon tordue, je ne saurais dire s'il y a un terme précis dans ce genre de situation.
Bref, nous enchainons sur un vertical au milieu de cette même diagonale avant d'effectuer une large demi-boucle afin de terminer sur un oxer placé dans l'autre diagonale.

Bon, ce n'est pas très clair ? En gros, cela donne quelque-chose comme ça :


Pour l'occasion, je suis verni, pour une telle séance je suis associée à l'imperturbable Mowara. Ceci dit, une fois la jument prise en compte, pour interpréter cette nouvelle, il y a deux écoles :
1- C'est chouette, avec ma Pépette, ça va être du Mozart.
2- On me refile la Mô parce-que ça va être un peu compliqué ce soir...
A vous de voir.

Sur le coup, après ma petite introduction sur les méfaits de l'acharnement littéraire, j'étais parti dans l'idée de passer vite fait sur les premiers croisillons franchis au trot dans l'optique de se mettre en confiance. Mais, à bien y réfléchir, et en y mettant les formes, ce pourrait peut-être devenir une histoire passionnante.
Voyons voir.

Quand Mowara sentit la délicate pression de mes talons sur ses flancs, elle sut alors que nous devions nous élancer ensemble dans un trot endiablé. La mécanique du geste était alors parfaite, une cadence régulière d'un diagonal à l'autre avec toute l'impulsion nécessaire me permettant de me soulever de la selle avec une surprenante facilité. Car elle a cette magie de donner l'impression d'offrir toute son énergie à son cavalier, que chaque foulée est un cadeau, une offrande que l'on se doit de savourer à chaque instant. Oui, Mowara est la générosité incarnée, donnant tellement de sa personne sans jamais rien demander en retour tout en ayant l'air de dire "laisse tomber, c'est pour moi".
Et oui, il y a les chevaux que l'on monte, et ceux qui nous transportent, qui nous accueillent à son bord avec le sourire de l'hôtesse et l'assurance du commandant de bord.

Bon d'accord, je m'arrête-là, un chapitre entier à décrire deux foulées de trot, le temps d'arriver jusqu'à l'obstacle vous auriez déjà eu le temps de relire Guerre et Paix.

Bref, c'est en ayant pleinement confiance en ma monture que j'aborde le parcours une première fois. Je me présente devant le saut de puce au trot comme demandée par La Mono et Mowara l'absorbe avec tout l'assurance qui la caractérise. Elle a naturellement enchainé sur le galop entre les deux barres et je la ramène à l'allure inférieure avant d'attaquer la diagonale et l'obstacle à franchir de traviole, mais qu'elle saura sans aucun doute aborder avec la même facilité.

Et vlan, raté, magnifique dérobade sur la gauche... La Monitrice se met à écarquiller les yeux, attentive plus que jamais à la façon dont je vais remédier à ce contre-temps.
J'effectue donc une volte pour me remettre sur le parcours et retourne affronter la barre, source de cet échec inattendu.

Et vlan, re-dérobade sur la gauche.
- DANIEL !!!
Oh, je sens la grosse voix de La Monitrice prendre l'ampleur nécessaire à toute mise au point verbale envers les élèves récalcitrants...
- Pourquoi elle part à gauche ta jument ?
- J'imagine que ça lui semble plus facile que de sauter l'obstacle...
- Alors qu'est-ce que tu attends pour serrer ta rêne gauche sur son encolure ?

J'opine du chef avec un petit salut militaire histoire de dire que je me mets aux ordres, et retourne affronter la barre avec ce conseil avisé.
Et effectivement, avec un petit rappel du mode d'emploi, l'adversité ne semble plus qu'un mauvais souvenir. Le reste du parcours s'effectue alors sans encombre : passage de l'obstacle dans la diagonale, départ au galop à droite avant d'aller effacer ce dernier oxer.

Les passages suivants se passeront fort heureusement sans encombre, preuve que je garde encore quelques capacités d'apprentissage en dépit des quelques décennies qui me sépare de ma naissance. ça fait plaisir.

Enfin, La Monitrice nous réunit au centre de la carrière pour nous faire une proposition inattendue, en relation directe avec la reprise que nous venons d'achever.
- Bon, le 15 avril, il y aura un challenge interne au club. Je vous invite à venir vous inscrire !
- Hein ? Même moi ?
- Oui, à partir de Galop 2 ! Petit concours entre nous, sans pression, hein !
Hum... Je regarde Yoh, qui semble songeuse sur sa selle...
- Tu comptes participer au concours, Yoh ?
- Je ne sais pas, et toi ?
- Okay, je veux bien le faire, mais tu t'inscris aussi !
- Chiche ?
- Chiche !
Comme quoi, les effets de groupe, ça pousse à faire des choses que l'on n'aurait jamais osé tenter si l'on avait été tout seul !

Une fois cette belle séance achevée, je pars faire mon coq dans la carrière en rangeant les chandeliers deux par deux et les barres trois par trois sous le regard admiratif de mes collègues avant de ramener la Mô dans ses quartiers.

Elle garde au fond bien des mystères. La simple idée de que vienne lui taquiner le toupet lui est insupportable, c'est quelque part sa griffe, son tempérament, sa marque de fabrique. Et pourtant, durant le bref instant où je m'approche d'elle pour la déséquiper de son filet, elle abandonne toute rétivité et offre sa nuque avec toute la bonne volonté du monde. Les mains de part et d'autre du frontal, je peux même l'espace de quelques instant me permettre de lui gratter une oreille en laissant doucement glisser le filet le long de son chanfrein. Elle ferme les yeux, éprouvant sans doute un certain soulagement à se voir retirer pour le reste de la journée cet élément qui ne doit pas toujours être agréable à porter.

Ben quoi ? Si l'on peut tenir un chapitre entier à décrire en long et en large deux petites foulées de trot, il y a surement moyen de faire un roman complet sur la vie trépidante d'un filet d'équitation en centre équestre

Sans doute l'objet d'une prochaine chronique...

En attendant, je tâche de relativiser la décision prise hâtivement en m'inscrivant pour le challenge interne...
Pinaise, j'ai déjà les miquettes...

4 commentaires:

  1. Je suis heureuse de retrouver tes articles qui me manquaient beaucoup !!


    et c'est génial pour le challenge, tu va voir que du bonheur ;).

    Cela dit, tu as une plume splendide, même quand tu te met à narrer une foulée de trot, tu le fais à la perfection.

    D'ailleurs, je t'ai fait une petite pub sur ma page fb de mon blog, parce que vraiment, un coup de coeur pour ton blog ;).

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  2. Bonjour, je viens de découvrir ton blog et je tenais à te dire bravo pour ce merveilleux style dont tu fais preuve. Les blogs de cette qualité sont rares, encore plus dans notre domaine. Je reviendrai lire le reste de tes aventures dès que j'aurai deux minutes ! A bientôt

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  3. J'adore comme tu écris, c'est génial… c'est passionnant à lire!

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