mardi 30 novembre 2010

Galops et tartufferies

Préambule

La veille, comme depuis plusieurs jours, il faisait bien frais au centre équestre. Nous avions prévus ma fille et moi de quoi se sustenter après sa reprise avec quelques tranches de cake aux fruits confits et surtout un bon gros thermos de chocolat chaud.
Mais à l'issue de la reprise, Fifille, toute contente de retrouver sa copine, s'en est allée faire la fofolle dans je ne sais quelle cachette secrète. J'ignore encore où elle se situe, mais je constate qu'elles en reviennent avec des brins de paille de la tête jusqu'aux pieds et un gros sourire moqueur aux lèvres façon tu-trouveras-jamais-où-on-était !
Bref, attablé seul avec la pitance, j'invite la Mono et une collègue de se joindre à moi pour partager le cake et le chocolat. La Mono appréciant peu les fruits confits, s'en est suivi une discussion sur les préférences des uns et des autres en matière de tartes et gâteaux. J'ai fini par lâcher qu'il m'arrivait parfois de confectionner des tartes au citron meringuées qui se tiennent assez bien, ce qui a aussitôt attiré l'attention de La Mono :
- Ah oui, la tarte au citron, j'aime beaucoup, je ne suis pas contre que tu en ramènes la prochaine fois. :P
- Certes, mais pour ça, il faudra d'abord que je tombe...
- Hmmm... Je vais voir demain ce que je peux faire pour toi...

Lundi 29 novembre 2010

Ma fille m'avait prédit que je monterai Quick. J'espérais personnellement Esparade, un grand bai qui m'attire l'œil depuis quelques temps, mais je misais plus volontiers pour un retour sur Granolat ou Itis.

Raté sur toute la ligne, j'hérite ce soir de Tartuffe. Un vieil alezan de taille modeste, deux belles balzanes derrière, des chaussettes dépareillées devant (c'est bien un mec, tiens) et une belle liste sur la tête qui a dû servir de modèle aux manuels d'équitation.
Mais Tartuffe est surtout un vieux monsieur. Il va sur ses vingt-quatre ans, mais bon-pied bon-oeil avec un bon esprit farceur. Avant de procéder à tout pansage, je profite d'avoir un peu de temps devant moi pour essayer de faire connaissance avec le Vieux. On discute, on caresse, on grattouille, j'aime bien aller à la recherche des points sensibles, et même parfois on rigole, surtout quand il me regarde d'un air ahuri faisant mime d'approuver telle grattouille à tel endroit !
Ou fronçant les sourcils (ne les cherchez pas, c'est une image) quand il apprécie moins.
Bref, il est expressif et sais très bien se faire comprendre. Je n'en oublie pas pour autant qu'il avait tout de même réussi à foutre par terre sa cavalière par deux fois il y a quelques semaines de ça...

Mon entrée dans le manège est assez mémorable. Mes collègues étant tous à la bourre ce soir là, je me retrouve quelques instants seul face à La Mono en attendant que les cavaliers de la reprise précédente aient quittés les lieux. La Mono me regarde d'un air tout étonné :
- Tiens, tu montes Tartuffe toi ce soir ?
- Euh... Ben oui... Enfin, c'est qu'il y a d'écrit sur la feuille...
- Hein ? Mais qu'est-ce j'ai foutu moi... Jéjé, il monte qui ?
- Pas bien vu. Quick, il me semble...
- Quick ? Nan, ça m'étonnerait...
- Par contre, j'ai vu que mon nom était d'abord associé à Gulliver avant d'être barré puis reporté sur Tartuffe.
- Ah bon ? Mais qu'est-ce qui m'a pris, moi aujourd'hui...

Donc, je monte Tartuffe ce soir. Je ne l'avais pas prévu personnellement, il semblerait que La Mono non plus ! :D

Une fois en selle, Monsieur n'attend pas que je règle mes étriers pour partir sur la piste, et à bonne allure s'il vous plaît ! Bah, si ça lui fait plaisir... Je prends mon étrier gauche, rallonge l'étrivière, et voilà le Tartuffe, pris par je ne sais quel moment de panique, qui fait une brusque embardée sur la gauche avec mine de partir au galop ! Avec un étrier dans la main et les rênes posées sur la selle, je n'en menais vraiment pas large... :S
Je ramène la bête au calme, le gronde gentiment, et reprends mon ajustage là où je l'avais laissé précédemment.

Et voilà que je t'embarque une seconde fois.
Et voilà que je t'embarque trois fois.
Et voilà que je t'embarque quatre fois.

Je me dirige alors vers la Monitrice et l'apostrophe ainsi d'un air inquisiteur :
- Dis-donc, le Tartuffe, tu ne lui aurais pas parlé de ma tarte au citron à tout hasard ?
- Bien sûr que si. Même que je lui ai promis tout un seau de carottes.

Tss, tss... Vilaine monitrice...

Je finis tant bien que mal par remettre les pieds dans des étriers à bonne longueur, pour constater que le Vieux se laisse conduire avec beaucoup de facilité, réactif aux jambes, précis dans la direction, volontaire dans l'effort, bref, un bon petit gars. :)
Et c'est parti pour la détente au trot. Dès les premières foulées, je sens un truc qui cloche, une allure nettement plus heurtée que celles auxquelles j'étais habitué jusque là.
- Il a un trot bizarre, le Tartuffe...
- Ben oui, il est un peu vieux et donc un peu raide.
- On va très bien ensemble. ^^

S'ensuit une petite séance de trot enlevé sans étriers, de préférence sur le bon diagonal (sans étriers, je gère pas) histoire de bien réchauffer des cavaliers passablement refroidi par la précocité de l'hiver. Pour tout dire, et au vu des températures négatives affichées sur le thermomètre, je ne m'imaginais pas transpirer ce soir. Et pourtant...

Mais nous entrons dans le vif de la séance avec la mise en place des aides pour demander un départ au galop à partir du pas, et de préférence à juste bien entendu.
Si je me souviens bien :
- On crie YAHAAA et ça part tout seul ;
- Jambe intérieure à la sangle ;
- Jambe extérieure isolée ;
- Poids du corps sur l'extérieur pour soulager l'épaule intérieure ;
- Eventuellement bout du nez vers l'intérieur (ah tiens, je croyais que c'était le contraire...)
- On sert les mollets, et ça doit partir tout seul. :)
NDA : le blog, ça fait aussi un bon pense-bête.

Après quelques tâtonnements, force est de constater que ça fonctionne plutôt bien. La Monitrice commande les départs au galop un par un, jusqu'à ce que tout le monde soit dans l'allure. Si jamais nos montures passent au trot, il nous est demandé de revenir au pas afin de redemander le galop comme il nous a été précédemment enseigné.
Au final, c'est plutôt rigolo à mettre en œuvre. :)

On s'amuse ainsi aux deux mains avant de pratiquer au trot une extension d'encolure afin de faire souffler nos montures. C'est amusant de sentir les rênes s'échapper petit à petit de nos mains au fur et mesure que le cheval s'étend ainsi, c'en est presque apaisant. :)

Retour au box, pansage, câlins, tout ça. Et je finis par laisser reposer délicatement ma tête quelques instants sur l'encolure du Vieux façon coussin, juste parce-que ça me détend et que j'aime ça. :)

Et puis j'avais pas envie de sortir du box. Dehors, ça caille.

mardi 23 novembre 2010

Salon de thé et barres au sol

22 novembre 2010

Loi de Murphy appliquée à l'équitation : les chevaux ont d'autant plus tendance à se rouler dans la boue et le crottin qu'ils sont clairs de robe.
Corolaire à la loi de Murphy appliquée à l'équitation : les chevaux pies ne se salissent que sur les parties blanches.

La Mô ne fait pas exception ce soir. Elle est un petit peu crotteuse et je m'en réjouis, ça me donnera d'autant l'occasion de la frotter avec amour. :)
Par ailleurs, elle ne fait pas, ou si peu, de poils d'hiver, et il est relativement aisé de lui donner un petit peu de brillant pour peu que l'on prenne la peine de la brosser consciencieusement. Mais il paraît que certains bestiaux, comme Mô ou Gulli pour ne pas les dénoncer, sont parfois retors à l'idée de se faire bouchonner...

J'en discutais justement la veille avec Kris, durant la reprise de ma fille. Elle et moi suivons les mêmes reprises du lundi soir tandis que nos filles respectives partagent celle du dimanche après-midi, ce qui permet de s'échanger nos impressions quant au cours précédent et établir quelques pronostics sur celui du lendemain.
Kris montait justement Mowara ce lundi dernier pendant que je me tassais consciencieusement le gras de mes fesses sur la Grano. La Mô étant justement réputée pour être un peu farouche, Kris m'expliquait qu'elle avait eu toutes les peines du monde ne serait-ce qu'à lui mettre un petit coup de brosse...

J'ai manifesté un air étonné, que j'ai par la suite transformé en un sentiment de plénitude personnelle proche de l'auto-satisfaction. D'aussi loin que je me souvienne, et je ne suis pas encore suffisamment ramollo du bulbe pour omettre ce genre de détail sur une douzaine de reprises, je n'ai pas encore eu l'occasion d'être confronté à de franches révoltes de la part de mes montures au moment des soins et grattouilles. :)

Ce soir-là ne fit pas exception. Certes, Mowara n'est pas super câline dans son genre, apprécie modérément le passage de la brosse sur le ventre et qu'on lui manipule la crinière, mais se laisse finalement bouchonner sans manifester autre chose que quelques mouvements de queue en guise de protestation. Et dès que je sens la moindre bribe d'agacement, je retourne lui brosser les fesses ou les joues, ce qui la calme derechef.
Encore faut-il le savoir... :)

Bref, je rêve, je fantasme, et tout jeune cavalier que je suis, je m'imagine être capable d'être à l'écoute de mes montures, d'en prendre soin jusqu'à tisser un lien de confiance entre nous et qu'elles me restituent une partie de l'affection que je leur consacre à chacune de mes visites.

Mowara n'a pas souhaité que je lui natte de sa crinière. L'ingrate.

Passé cette accès de mauvaise tête, elle se retrouve toujours aussi agréable une fois les fesses posées dessus. Précise, réactive, volontaire, et d'un confort inouï au trot assis... quand on a goûté à la Grano la semaine précédente. ^^

Nous ne sommes que six ce soir dans le manège. Mumu a apporté à la Mono un thermos d'eau chaude accompagné de quelques sachets de thé et des gobelets pour servir tout ça. C'est une délicate attention qui rend ainsi La Mono de super bonne humeur. Assise ainsi sur son ballot de paille, je m'apprêtais pourtant à lui balancer une petite vacherie, mais face à son sourire en coin, je me suis finalement abstenu. :)

Après la détente, La Mono prend le temps de nous expliquer le pourquoi de certains exercices, du trot assis au travail en équilibre, et nous fait comprendre que non, la mise en selle n'est pas destinée qu'à reporter sur les jeunes élèves les sévices subies durant les longues années d'apprentissage.

Mais un peu quand même.

Donc ce soir, passage de barres au sol. L'occasion de travailler les allures en équilibre avec comme objectif personnel de lâcher enfin cette fichue crinière.
Plus compliqué que je ne me l'imaginais, je me contente pour l'instant de mettre mes mains en contact sur le haut de l'encolure qui pour me donner le point d'équilibre nécessaire à rester en place. Mais ça a au moins la mérite de me faire baisser mes mains tout en me permettant de bien suivre le mouvement sans se raccrocher aux rênes.

Le franchissement des barres en elles-mêmes ne posent pas vraiment de problèmes, si ce n'est des passages pas toujours très au milieu, mais je me fais surtout remarquer pour ne pas serrer suffisamment les mollets autour du gros bidou de la bête.
Je rectifie le tir au fur et à mesure des passages, mais rien à y faire, ça ne semble jamais suffisant. "Les mollets ! Serre les mollets !!!" sera mon leitmotiv de la soirée. J'aurais eu beau serrer autant que possible, ça n'aura jamais été suffisant. Il y a manifestement un truc qui m'échappe...

Fin de la séance, retour au box, pansage soigneux et gros câlins précédent une tentative foireuse de prendre quelques photos de nous deux façon t'es-ma-bestah-que-je-te-fais-pleins-de-bisous-que-je-t'aime-trop-fort-c'est-pour-la-vie.

Oui, je sais, je régresse. ^^

La nuit, ni crampes ni courbatures ne viendront troubler mon sommeil. Elle avait raison la diablesse Mono, je suis encore trop mou du genou. :S

La prochaine monture n'aura qu'à bien se tenir, à la fin de la séance, elle m'appellera "L'Etau".

Ou pas.

mardi 16 novembre 2010

La trotteuse et la crampe

Préambule
Dimanche 14 novembre 2010

Outre le fait d'aller admirer Beltane monter Granolat avec un certain bonheur pour sa séance du dimanche matin, ma fille m'avait entraîné au centre équestre dans le but de demander à la Monitrice de lui réserver Paillette, son shetland gris pommelé préféré qu'elle n'avait encore jamais monté...
- Ah mais c'est trop tard, j'ai déjà établi ma liste pour l'après-midi !
- Hmm... J'ai fait des crêpes ce matin... Des crêpes au Nutella...
- Mouais... Elles sont grandes comment tes crêpes ?
- Ben, normales quoi, des crêpes de crêpières, pas les grandes des professionnels.
- Ah, mais ça ne va pas, j'aime que celles-là moi !
- Gasp... :(
- Bon... Écoute, amène deux crêpes, au moins, et on verra ce que je peux faire...

Miracle, en arrivant l'après-midi, le prénom de ma fille était inscrit dans la case de Paillette ! :D

La reprise terminée, armés d'une boite en plastique blindée de crêpes au Nutella, nous nous sommes rendu au bureau où se trouve La Monitrice pour nous acquitter de notre dette. Elle se mit alors à savourer son dû devant un parterre de cavalières les yeux humides et la bave aux lèvres...
Une fille : Ben, c'est pas juste ! Pourquoi tu as droit à des crêpes au Nutella, toi ?
La Monitrice : C'est ça d'avoir des élèves qui tombent...
Moi : Ben... Je suis jamais tombé !!!
La Monitrice : Ah oui, c'est vrai... Il faudrait que j'y remédie...
Une fille, jalouse : T'as qu'à lui donner Quick pour une séance de saut !
La Monitrice : Quick au saut, c'est sûr, il va tomber... ^^

Ça m'apprendra, tiens...

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15 novembre 2010

Je rigole.
Bon, je suis toujours de bonne humeur pour peu que je mette un pied dans un centre équestre, mais ce soir je rigole vraiment un prenant connaissance de ma monture du jour. En effet, je me retrouve avec Granolat, la trotteuse que Beltane avait étrenné la veille et dont elle m'avait dit le plus grand bien. Je me délecte par avance à l'idée de la rendre verte de jalousie au moment de lui apprendre la nouvelle. :D

Dans le box, elle est toute propre, c'est suffisamment rare pour être souligné, et ça fait bien plaisir. Le pansage est une formalité, la demoiselle étant d'une gentillesse exemplaire et réceptive à toute forme de câlins et de bisous. :)
Je me laisse donc aller à l'affubler de quelques coquetteries bien méritées. Je décide d'innover en lui tressant cinq petites nattes disposées de façon régulière le long de la crinière. Et pour une fois, j'avoue être assez content du résultat, l'ensemble est plutôt propre et présente bien. Je rentre donc dans le manège avec une certaine fierté, impatient de découvrir en selle ma nouvelle compagne.

A la détente, je fais mon fier en passant devant la Monitrice, torse bombé, port altier, et tout le tralala.
- Jolies, les tresses, dit-elle, et bien régulières en plus, bravo.
Hihi...^^
- Mais c'est dommage pour les brins de paille dans la queue... En principe, tu me dois une bouteille...

Comme quoi, la fierté, ça tient à peu de chose...

Détente au trot. Comme les semaines précédentes, je galère à vérifier sous le bidon de la monture si je suis sur le bon diagonal. Je m'emmêle les pinceaux régulièrement et me fait d'autant rappeler à l'ordre. Il est donc temps de changer de tactique : je laisse tomber les jambes et me concentre donc sur le mouvement des épaules.
Et là, déclic ! Je trouve le truc tout de suite, de façon presque instinctive, sans avoir à me contorsionner de tous les côtés, ce qui me permet enfin de regarder devant moi, et non plus dessous...
Pourquoi n'y avais pas pensé plus tôt ? Jusqu'à la fin de la séance, je ne me suis plus trompé une seule fois !
Content. :)

Mais la séance n'a pas encore vraiment commencé. Les choses sérieuses débutent réellement avec le trot assis sans étriers, et je vais découvrir durant le reste de la reprise ce qui se cache vraiment derrière une trotteuse...
Depuis le début de l'année, je n'ai pas le souvenir d'avoir été autant secoué.  Mes sismographes étant à saturation, j'éprouve les plus grandes difficultés à tenir en selle, chaque bosse et chaque virage ayant tendance à me faire glisser d'un côté ou d'un autre. Pour rester à peu près en place et maintenir l'allure, je dois m'employer avec les jambes avec une vigueur qui me fait rapidement transpirer sang et eau malgré les six degrés de température. Le petit pull était décidément de trop ce soir...

Après cette petite mise en bouche au trot, le galop - toujours sans étriers - est presque un soulagement ! Pour les autres, c'est une découverte, pour moi, un vrai bonheur sur une jument volontaire à cette allure. Elle boucle son premier tour à une vitesse inédite qui m'aurait frisé les moustaches si j'en avais une, mais à l'approche de la Monitrice, elle freine un bon coup et repasse au trot, m'envoyant ainsi faire connaissance avec l'intimité de son toupet.
Ouf, la chute n'était pas loin...
Je me raccroche in-extremis, et repart au galop tout aussi gaillardement. Et au bout d'un tour, re-belote. Monitrice, coup de frein, et embrassade à l'encolure...
- C'est dingue, à chaque fois qu'elle passe ici elle repasse au trot !
- Oui, c'est parce-qu'elle me voit... ^^

Je repars pour un dernier tour, mais cette fois ci, j'anticipe le coup. La Grano repasse bien au trot comme prévu, mais je reste droit comme un piquet, et resserre les jambes un bon coup pour assurer l'équilibre.
Et crac, la crampe au mollet, la belle, celle qui fait semer des étoiles un peu partout... Décidément, chaque séance est l'occasion de faire connaissance avec de nouvelles souffrances...

Ouf, un petit tour au pas pour faire souffler chevaux et cavaliers est le bienvenu. A peine la moitié de la séance est-elle passée que je suis déjà exténué et perclus de douleurs... :S

Pour le galop à l'autre main, la Monitrice propose de rechausser les étriers. Fier comme je suis, je décide de rester pieds nus et d'assumer jusqu'au bout. Mal m'en pris, je n'arrive plus du tout à serrer les pattes, et manque à plusieurs reprises de mordre la poussière dans les diverses transitions. La Monitrice, ayant bien repéré mes difficultés, m'interpelle :
- Bon, Daniel, je sais à quoi tu penses...
- Ah ?
- Oui, contrairement à ce que tu pourrais croire, je ne t'ai pas refilé Granolat pour que tu te foutes par terre, même si tes crêpes sont excellentes...
J'avoue que cette pensée m'avait pourtant traversé l'esprit... J'accorde donc un point médium à la Mono.

Nous finissons la séance avec des exercices en équilibre aux trois allures. Se tenir debout est une bénédiction, cela me permet de procéder en parallèle à quelques étirements qui me soulage la gambette avec bonheur.
Et puis l'équilibre est un exercice que j'aime bien. En accompagnant bien le mouvement avec les jambes, c'en est presque confortable au trot et grisant au galop. Il faudra quand même que je lâche cette crinière un moment ou un autre...

Et pour la première fois, le mot "saut" est prononcé La Monitrice. Non pas que ce soit prévu à court terme, mais il nous a été promis quelques passages de barres au sol pour la prochaine séance...
Youpi. :)

Je retourne au box complétement lessivé. Je libère Grano de son équipement, qui en profite pour effectuer sous mon nez une belle roulade dans la paille.
Après le pansage, je me surprends à coller ma tête contre son encolure façon oreiller, et me demande si je n'ai pas somnoler pendant quelques instants... Je me serais laissé aller un peu plus, et je m'y serais sans soute endormi.
Et ça ne m'aurait pas déplu. :)

Je n'ai jamais été autant vidé à l'issue d'une reprise d'équitation. Je mesure ainsi toute l'étendue des progrès qu'il me reste à accomplir pour aborder des chevaux moins souples en toute sérénité.
Bref, il y a du boulot, c'était dur, mais j'en redemande ! Je suis même prêt à remonter sur la Grano dès la semaine prochaine. ^^


Peu après mon retour à la maison, il s'est remis à pleuvoir.. Étonnant, non ? :)

mardi 9 novembre 2010

Une éclaircie dans la grisaille

8 novembre 2010

La veille, pendant la journée du dimanche, je m'étais bien moqué de mes petits camarades des galops supérieurs. Tous les élèves de La Monitrice, qu'ils soient du matin ou de l'après-midi, ont eu droit à une séance de mise en selle éprouvante. Elle consistait à rester en équilibre pendant une bonne vingtaine de minutes sur des étriers raccourcis façon jockey, ou presque, aux trois allures, et sans bien sûr reposer la moindre fesse sur la selle sous peine de se faire desserrer la sangle de trois bons trous à chaque infraction constatée.

Moquerie, certes mais aussi admiration, car force est de constater qu'ils ne s'en tirent pas si mal, ces cavaliers. Même ma fille, pendant sa reprise shetland, est arrivée à m'épater en galopant sur sa bardette sans étriers avec les mains sur la tête !
Face aux jeunes cavaliers qui n'ont peur de rien et les expérimentés qui impressionnent le débutant, on se sent peu de choses finalement. Ce n'est pas à nous que ce genre de séance arriverait.

Ce soir, je retrouve Okilébo, officiellement baptisé Gulliver, le sublime cheval noir qui décoince. C'est une assez bonne surprise pour moi, je commence à avoir une réelle inclination pour les noirauds depuis quelques temps.
A mon arrivée, Gulli semble manifester une certaine curiosité à mon égard. Il passe sa tête par dessus la porte, me regarde avec insistance et me renifle d'un air gourmand. Les friandises sont pourtant bien cachées au fond de la musette, je dois sûrement avoir une odeur familière depuis le temps que j'arpente ces écuries. Pendant un bref instant, je me suis même laisser imaginer que je pouvais lui être sympathique. Bien évidemment j'ignore totalement ce qui se peut se passer dans sa tête à ce moment précis, mais comme beaucoup de cavaliers, j'éprouve le fantasme de croire qu'un cheval de club puisse éprouver une réelle sympathie à l'égard d'un cavalier.
Ben quoi, ça fait partie du rêve, non ?

Mais dans le box, Okilébo fait preuve d'une certaine nervosité. Non pas qu'il refuse de se laisser panser ou manipuler, mais il manifeste une réelle envie d'aller voir ce qui se passe au delà de la porte. Je trouve que c'est plutôt bon signe, je prends ça comme un gage de bonne volonté.

Après pansage dans les règles et équipement de la bête, nous sortons prendre un peu l'air avant d'entamer la reprise. Exceptionnellement, alors qu'il a plu sans discontinuer pendant plus de trois jours, le ciel s'est soudainement dégagé allant jusqu'à laisser percevoir quelques étoiles dont celle du Berger. Côté météorologie, nous sommes décidément bénis des dieux. Peut-être sont-ils sensibles aux offrandes, sous formes de petits drapeaux divers, que je dédie tous les lundis matin à Saint-Paul-le-Poulpe, saint-patron des prévisions...

Malgré la clémence des cieux, la carrière est détrempée et nous allons pour une première fois effectuer la reprise sous la toiture du grand manège. Au fond, ont été entassés jusqu'au toit quelques ballots de paille compressée, bien à l'abri en prévision de l'hiver. Ici et là, certains ballots ont été prélevés, ce qui permet à La Monitrice de se hisser à bonne hauteur et trouver un point d'observation avantageux et isolé de la fraicheur du sol. On peut considérer qu'elle est en ballotage favorable...

Ce soir, il n'y a que cinq cavaliers dans le manège. Beaucoup manquent à l'appel, sans doute refroidis par des perspectives météorologiques peu rassurantes. Je m'étais dit justement en début d'année que nous reconnaîtrons les vrais accrocs à l'arrivée des premiers frimas... Tant pis pour les autres.
M'enfin... Au montoir, je descends les étriers et m'apprête à les régler à une longueur convenable quand je constate que ceux-ci sont calés incroyablement courts. Je laisse alors échapper cette réflexion :
- Mais, c'est qui ce nain qui est monté avant moi ???
Ce détail aurait du me mettre la puce à l'oreille...

A la détente, Gulliver est fidèle à lui-même : pas trop généreux à l'effort, il faut savoir le stimuler en le caressant régulièrement sur l'épaule avec le flot des rênes. Ce coup-ci, je ne suis pas pris au dépourvu et ne me laisse pas impressionner comme lors de notre première association. Il faut bien entendu le rappeler à l'ordre de temps à autre, ce qui m'embrouille d'autant dans ses histoires de bon et mauvais diagonal au trot enlevé. Par ailleurs, ce cheval est incroyablement souple dans ses allures, à tel point que j'en ai même parfois du mal à sentir la transition du pas au trot tellement il est confortable.

Et le galop est un pur bonheur, Gulliver est un incroyable Pullman qui change radicalement de la soubresauteuse Mowara. On pourrait y avaler un café sans renverser une goutte, et je savoure un plaisir comme j'en avais rarement éprouvé à cheval auparavant. D'autant plus que le Monsieur est plutôt volontaire au galop, et qu'il n'est nul besoin de s'employer pour entretenir cette allure, amplifiant d'autant ce moment de plaisir.
Je ne sais plus combien de tours nous avons effectué ainsi, mais j'ai la ferme impression d'avoir plus galopé en une seule séance que lors de toutes les autres réunies ! J'aurais volontiers poursuivi jusqu'à la fin de la reprise, voire au delà, mais La Monitrice, du haut de son ballot de paille, avait une autre idée derrière la tête...

- Bien. Venez me voir.... Vous allez tous me raccourcir vos étriers de... allez, disons six bons trous. Vous savez tous compter jusqu'à six ? Et si vous n'avez pas six trous à vos étrivières, vous n'aurez qu'à y faire un nœud !
J'émets un rire surpris...
- Alors ça... Je ne pensais pas que tu nous ferais ce coup-là, à nous les débutants !
- Ben quoi ? Il n'y a pas de mal à faire comme les cavaliers expérimentés ! Et puis d'ailleurs, ce ne sera pas six trous que vous allez raccourcir, mais huit !
Ah la garce, elle a osé !
Elle poursuit :
- Bon, à partir de maintenant, vous allez vous mettre en équilibre, et le premier que je vois se rassoir dans sa selle, c'est un trou en moins à la sangle ! Et c'est parti pour... (elle consulte sa montre...) vingt-cinq minutes !
Un seul trou en cas d'infraction, finalement, elle est plutôt sympa avec nous...

Bref, tant bien que mal, nous nous exécutons, se raccrochant à ce que nous trouvons sous la main tant que nous ne tirons pas trop sur la tronche de nos pauvres montures qui nous font le plaisir de nous supporter. Comme la plupart de mes petits camarades, je me raccroche à la crinière. Celle de Gulli étant rase, l'exercice n'en est que plus délicat, mais dans l'ensemble, chacun se débrouille plutôt bien, essayant d'adopter la posture qui nous fera tirer le moins sur les gambettes.
Au vue de la température affichée sur le thermomètre ce soir, j'avais enfilé ma polaire pour rester au chaud. Mal m'en pris, je transpire comme un bœuf !

- Faites comme si vous ne ressentiez pas la douleur ! Ose La Monitrice...
- Tiens, le dernier à m'avoir dit ça était mon sergent-chef pendant mon service militaire !
- Aha ! Tu oses me comparer à ton sergent-chef ???
D'un autre côté, ceux que j'ai connu étaient tout de même moins avenant...

Nous continuons ainsi aux trois allures. Au galop, je décide de me prendre au jeu : je plie les genoux, m'allonge légèrement sur l'encolure, y pose les deux mains et essaye de suivre le mouvement avec les jambes. Pendant quelques instants, je me suis imaginé à la place d'un jockey de plat sur un champ de course. La sensation y est drôlement grisante et, pendant un bref moment, j'ai effectivement oublié la douleur.

Mais nous pouvons toujours compter sur les idées diaboliques d'une monitrice imaginative pour nous faire recouvrer la mémoire... Pour terminer la soirée sur une note inoubliable, elle nous demande de déchausser... tout en restant en équilibre !
Pendant une petite minute, nous avions l'air tous aussi ridicules les uns que les autres à essayer de trouver une position sur la selle qui nous empêche d'y poser les fesses sans toucher aux étriers ! Mais bonne humeur assurée, toujours ça de pris !

Finalement, cette séance de mise en selle n'a pas du dépasser le quart d'heure. Malgré tout, le retour au sol a fait émettre quelques gémissements aux cavaliers au contact de leurs jambes sur le sol. Les lendemains risquent d'être bien douloureux...

Retour au box. J'ai à peine commencé à brosser mon noiraud que la plupart des autres cavaliers ont déjà plié bagage.
Tant pis pour eux, pour ma part, j'aime jouer les prolongations ! Je brosse et soigne jusqu'à plus soif, et même si Gulli se semble pas super sensible aux caresses, il paraît particulièrement apprécier les bisous sur la joue. Inutile de préciser que je ne me prive pas !
A force de papouilles diverses, je finis par découvrir son point faible : il adooooore se faire gratouiller sous la gorge ! Bien entendu, je ne me prive pas non plus de le satisfaire, et après de longues étreintes, j'éprouve un vrai regret à le laisser tranquille dans son box pour la nuit.
J'en suis quitte pour lui piquer un crin de sa queue qui ira rejoindre celui de Mowara suspendu accidentellement à la manche depuis la semaine dernière.

Cette nuit là, des étoiles plein la tête, j'ai eu du mal à m'endormir. Je crois que je suis amoureux...

Le lendemain matin, au réveil, le sol détrempé aperçu à travers la fenêtre ne laissait aucun doute. La pluie avait refait son apparition dans le courant de la nuit...

mardi 2 novembre 2010

Gadins et tartufferies

1er novembre 2010

Il est un certain nombre de cavalières - et peut-être même de cavaliers, personne n'est parfait - qui suivent assidûment mes chroniques en attendant avec une impatience non feinte le récit haletant de mon tout premier voyage selle-sol. Je dois avouer que jusqu'à présent, je les ai toujours déçues...

Et pourtant, je vous promets que j'y mets de la bonne volonté. Quelque-soient les exercices biscornus et acrobatiques proposés par La Monitrice, je les exécute avec bonne grâce et suis même toujours impatient de découvrir à quelle sauce nous allons être croqués en arrivant au montoir. En me doutant que chaque nouveauté introduite dans le cours, bien qu'indispensable dans l'apprentissage de l'équitation, nous offre de nouvelles opportunités d'aller mordre la poussière, en particulier lors de leurs premières mises en application...

Pris dans les bouchons de retour de week-end, j'arrive ric-rac au centre équestre, avec femme et enfant que je n'ai pas eu le temps de déposer au passage. Fifille est bien entendue ravie, Madame espère quant à elle trouver sur place une assistance respiratoire...
Dans le box, je retrouve ma fidèle Mowara, encore une fois toute transpireuse, pas brossée pour un sous, le mors non rincé et tout dégueu, grrrrr...  Pressé par le temps, j'arrive tout de même à lui tresser deux vilaines nattes - pour les pions on verra la prochaine fois - avant d'être appelé avec le reste de la troupe dans la carrière, fort humide au passage, pour le début des festivités.

Et le menu du jour est annoncé haut et fort : ce soir, il y aura de la mise en selle !
Mes petits camarades ignorants jusqu'à l'existence même de cette pratique occulte, j'éprouve un malin plaisir à l'idée de découvrir leurs mines déconfites quand seront annoncés les détails des exercices sympathiques à venir. :)

La détente qui s'ensuit me rappelle que j'ai encore affreusement tendance à m'emmêler les pinceaux et les diagonaux au trot enlevé. Il y a encore du boulot sur ce point, et l'annonce du retrait des étriers par La Monitrice n'en sera que plus salutaire pour me sortir de cette relative galère.
Nous enchainons donc par quelques tours de trot "pieds nus'". Enfin, un petit tour pour commencer... J'ai à peine le temps de boucler mon premier que Tartuffe, un hongre pourtant bien âgé et sensé être sage, envoie sa cavalière prendre la température du sable humide une première fois.
Remise en selle, et rebelote : quelques tours plus tard, la même cavalière se retrouve envoyée par terre au même endroit par ce même Tartuffe, qui, pour finir de narguer l'assistance, démontre que malgré sa vingtaine il reste encore un garçon énergique en courant dans tous les coins de la carrière.
Ce qui a le don d'agacer prodigieusement La Monitrice...

La séance de trot terminée, elle nous fait rechausser les étriers, au grand soulagement de certain (dont je ne fais pas partie...), et nous envoie tâter un peu de galop à main gauche. Le rallongement des étriers me donne indubitablement une assise plus confortable à cette allure, mais j'ai assez peu l'occasion d'en profiter, une nouvelle cavalière est envoyée à son tour découvrir les joies du bain de boue automnal, repeignant au passage son pantalon d'équitation d'un marron très tendance en cette saison.

L'idée de profiter de nombreux gâteaux redonne le sourire à la Mono qui nous fait repartir là où nous en étions. Toutefois, l'expérience précédente semble avoir calmé quelques ardeurs : je croise quelques cavaliers au trot, au pas, un peu n'importe où, ce qui fait froncer les sourcils de la Monitrice... Elle n'est pas contente du tout, et nous le fait savoir en nous soufflant une bonne petite gueulante qui nous rappelle qu'il existe quelques constantes chez les moniteurs d'équitation... :)

On repart dans un dernier tour de galop, histoire de finir sur une note à peu près propre. Il y a un progrès notoire dans la conduite de ma monture : j'arrive sensiblement à la faire courir sur la piste, les aides apprises la semaine dernière y étant sans doute pour beaucoup.
Enfin, un petit peu de trot, de pas et de câlins sont mis en œuvre avant de mettre pied à terre et clore la séance du jour. En passant devant la Mono, j'ose une remarque imprudente :
- Mais, euh... On ne devait pas faire de la mise en selle aujourd'hui ?
- Si, mais les chevaux étaient trop cons ce soir, ce sera pour la prochaine fois...

Sur le coup, j'en étais presque déçu. Ce soir, je suis resté bien sagement collé à ma selle, et pas une seule seconde je ne me suis senti en état d'aller mordre la poussière. Certains s'en contenteront, c'est peut-être même le signe de quelques progrès, mais cela a pour moi un goût de trop peu, surtout après la journée pleine de découvertes du lundi précédent.

J'ai envie de faire des exercices à la con.
J'ai envie de galoper sans étrier.
J'ai envie d'aller tâter des barres.
J'en aurais presque envie de me foutre par terre, afin de pouvoir de dire "Punaise, ça c'est un truc malade, faut être drôlement balèze", même si ça n'a l'air de rien, il n'en faut pas beaucoup pour m'effrayer.

Bref, j'ai envie d'aller voir plus haut, quitte à me retrouver tout en bas.


Mais en attendant, la semaine prochaine, ce seront les autres qui régaleront. :)

PS : le lendemain matin, en partant pour le boulot, je trouve coincé dans une fermeture éclair de la manche de mon blouson d'aviateur un long cheveu roux qui aurait fait dresser ceux de Madame si cette dernière l'avait découvert avant ma pomme...
Sur le coup, je m'interroge : trop clair pour appartenir à Madame, trop long pour appartenir à Fifille...
Je vous arrête tout de suite, il est aussi trop court pour appartenir à La Monitrice, honnit soit qui mal y pense...
Mais bon sang mais c'est bien sûr, MO-WA-RA ! :D