mardi 14 juin 2011

Farces et attrapes

13 juin 2011

Sous leurs airs plus ou moins placides et dociles, nos amis équidés se révèlent être parfois de satanés farceurs. Comme s'il leur prenait, de temps à autre, l'envie de nous rendre la pareille et nous faire passer à notre tour pour des bourriques. Et je les soupçonne même de le faire exprès, cogitant en troupe sur la meilleure façon de rendre dingue les cavaliers les plus aguerris. Ils se rassemblent, nous regardent, rigolent de notre faible condition, conspirent, échanges des messes basses, échafaudent des plans machiavéliques et retournent à leurs petites activités comme si de rien n'était, guettant ainsi le premier candidat à tomber dans leur chausse-trape.
Oh, je sens tout de suite venir un procès en anthropomorphisme. Mais que voulez-vous, en matière d'équitation, je reste un grand naïf. Prêter des sentiments humains aux chevaux, c'est un peu comme la paix dans le monde, on n'y croit pas vraiment, mais on l'espère parfois.

Vilain comme je suis, je profite bassement de l'absence de Nikko ce soir pour lui chiper son cheval, et Esparade semble en être le premier surpris. A l'issue d'une première prise de contact, et après qu'il ait repéré le licol fermement tenu dans ma main droite, ce grand échalas décide de jouer avec mes nerfs.
D'abord en me présentant ses fesses, ce qui induit une situation assez peu favorable pour lui enrubanner le museau. Puis en se dérobant systématiquement à mon approche, mais de façon subtile, sans prendre le galop, juste en accélérant le pas au moment précis où je pensais lui mettre la main sur la crinière. Enfin en allant jouer à cache-cache derrière son grand copain Don Nuevo. Ce dernier, sous un air nonchalant, faisant semblant de brouter quelques touffes d'herbe, semble par ailleurs prendre un certain plaisir à jouer les barrages mobiles.
Après cinq bonnes minutes de ce petit jeu, Esparade, avec un air de grand seigneur, se plante finalement sur ses gambettes en mimant un signe de tête l'air de dire "Okay, c'est bon, je te laisse venir".
Manière de bien me faire comprendre que le maître du jeu, c'est lui.
Saleté.

Une fois paré de tous ses attributs de travail, nous voici en carrière pour une détente des plus agréables. Quelles que soient les allures, je me sens étonnement bien en selle. Au trot sans étriers, j'arrive par de subtils mouvement du bassin à dompter son petit rebond, et il me semble avoir, pour un fois, une position relativement correcte pour ces quelques petits tours de galop. Seul petit bémol sur la partition, Esparade me semble un poil endormi. Pour le réveiller, j'entreprends de lui chatouiller une épaule avec le flot des rênes. Mais il suffit que je le prenne dans une main pour qu'il allonge de lui-même le pas... avant de ramollir quelques foulées plus tard...
Hum, on veut jouer, hein ?

Exercice du jour : passer quelques barres au trot assis, marquer un arrêt prolongé, puis repartir au pas avant de demander un galop à main droite. A priori, rien de bien compliqué donc...
Je m'élance pour mon premier passage, m'assois correctement dans ma selle, passe entre les cônes qui matérialisent le début de l'exercice, franchit sans encombre les barres au sol et obtient un arrêt franc que je prolonge cinq bonnes secondes.
Jusque-là tout va bien.
Puis départ au pas, je place les aides comme prévu par le code de la piste édition 2011, et obtiens un magnifique... départ au trot...
Sous la selle, ce gros nigaud d'Esparade rigole comme vache qui pisse, bien content de ce vilain tour qu'il vient de me jouer devant l’œil médusé de La Monitrice.
Après que chacun ait effectué son exercice avec des résultats contrastés, elle nous convoque pour un petit débriefing...
- Bon... Vous êtes au pas, vous placez vos aides correctement et votre cheval ne part pas... Pourquoi ?
Bien entendu, un ange passe. Comme, en l'état actuel de nos connaissances, il est improbable qu'un cheval ne puisse obéir à un départ au galop dans les règles, nous établissons tout un palmarès d'hypothèses farfelues :
- Il n'a pas envie ?
- Nan, cherchez encore.
- Il a vu passer un poulain ?
- Ya pas de poulains, cherchez encore.
- Il se fout de nous ?
- Ce serait bien possible ! Nan, si votre cheval ne part pas au galop, alors que vos aides sont placées correctement, c'est qu'il manque d'im-pul-sion.
C'était donc ça ! Promis, à la première occasion, je file dans mon magasin d'équitation préféré acheter une pleine boite d'impulsions.
Et La Mono de poursuivre :
- Et si votre cheval manque d'impulsion, c'est que vous avez mal effectué votre détente.
Ah... Bon, inutile donc d'aller faire des emplettes cette semaine, j'aurais sous doute eu l'air malin devant le vendeur...

Bref, nous y retournons, après avoir au préalable injecté un peu d'impulsion dans le réservoir. Résultat, Esparade part au trot comme à Vincennes, franchit les barres en les survolant et s'arrête laborieusement en travers avec les pires difficultés à rester en place. Mais part au galop à la première sollicitation. Victoire !
Ah, on fait moins le malin maintenant, Môssieur le Grand Bai ?

La Mono :
- Vous déchaussez les étriers et refaites la même chose en demandant un galop à gauche !
Bien. Maintenant qu'Esparade a compris qui était le patron, il n'y a plus qu'à s’exécuter sereinement ! Mais cette tête de mule n'arrive plus à tenir en place à l'arrêt, ayant sans doute intégré l'exercice dans son subconscient et anticipant chaque demande à venir. En bataillant un peu, beaucoup même, j'arrive peu ou prou à le tenir en ligne. Je lui demande le pas, puis enfin le galop à gauche.
Bien entendu, ce farceur part à droite... et quatre fois de suite, s'il vous plaît ! Pour lui remettre les neurones à l'endroit, je le cale sur la piste à gauche pour enfin obtenir un départ correct. Mais quelle bourrique celui-là !
Mais je lui pardonne, il a décidément un galop drôlement chouette, et j'éprouve des scrupules à l'arrêter à l'issue de la séance...

Cette reprise achevée, je le libère dans son pré, lui fait un bisou-carotte et, alors qu'un barbecue est prévu ce soir, c'est la météo qui décide à son tour de nous faire une bonne blague en faisait tomber une abondante pluie d'orage. Fort heureusement, elle s'arrêtera bien vite, au contraire de la soirée farce qui, elle, continue son œuvre...

Alors que les premières pépites de charbon commencent à s'embraser, le Grand Barbu, un truculent petit bonhomme chargé des balades à poney le dimanche et les jours fériés, se présente à nous à moitié couvert de boue : un shetland lui a échappé des mains et gambade en ce moment précis dans son pré avec son licol et la longe entre les pattes. Une expédition de cinq braves volontaires est alors mise en place pour aller mettre la main sur la farceuse.
Puis six. Puis sept. Puis huit, neuf, dix... Toujours sans aucun succès. La ponette shetland nous fait une magnifique démonstration de techniques rugbystiques avancées. Démarrage, accélération, crochet, cadrage-débordement, Lolita, c'est son petit nom, nous ressort toute la panoplie d'un trois-quart centre de classe internationale.
Au bout d'une vingtaine de minutes de chasse-patate, et la faim commençant à nous tirailler l'estomac, il est de plus en plus admis qu'un shetland à la broche supplierait à merveille merguez et autre saucisses grillées.

La bestiole débarrassée de son licol - et relâchée saine et sauve, le repas avalé dans la bonne humeur, la météo nous fera un dernier caprice juste avant le dessert.
Bah, pas grave, même la pluie était joyeuse ce soir !

2 commentaires:

  1. Ah, un barbecue... ça sent la fin de l'année... Déjà!

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  2. Oooh, j'adore encore et toujours !

    Ahah, tu commences à entendre parler d'Impulsion. Plus encore que l'Incurvation (voui voui avec des majuscules s'vou plait !) l'Impulsion va te suivre absolument paaarttouuuuut ! Héhéhéh.

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